Salon du livre Amiplume au Puy-en- Velay le samedi 28 octobre 2023
Tricotin Tricotons
La leçon de tricot
Chez les grands-parents
Le Puy 1961
Certains après-midi, c’était cours de tricot pour la
marmaille dans la salle à manger.
Dans les tiroirs du buffet de la salle à manger,
Mémé avait des pelotes de laine de toutes les
couleurs et de toutes les grosseurs.
De très nombreuses paires d’aiguilles à tricoter de
tous numéros.
Alors, commençait la leçon de tricot.
Tous étions très appliqués avec notre laine,
Et parfois, quand grand-mère tournait le dos :
leçons d’escrime avec les aiguilles,
Mais bien vite arrêtées par peur de se faire mal.
Greg tricotait très serré et moi plus lâche.
Les autres, comme ils pouvaient.
Grand-mère passait son temps à remonter nos
mailles tombées.
Grand-père lisait le journal du jour à grand-mère et
les actes de décès,
C’était la seule chose qui les intéressait
« Les morts ».
On entendait le cliquetis des aiguilles
Et nos rires aux noms des morts.
Sous la table, un petit malin mélangeait les pelotes
de laine
Et après c’était la pagaille pour tout ranger.
C’était dans la joie et la bonne humeur ces leçons
de tricotage,
Et c’est grâce à grand-mère qu’encore aujourd’hui,
Je tricote.
Le gigot du dimanche
Le Puy 1960
Quand papa était là et que le porte-monnaie était
bien plein, maman achetait un gros gigot.
À la boucherie, dans notre quartier bien aimé, la
Place de la Mairie.
Il y avait tous les commerces.
Papa préparait ses deux plats en terre marron,
L’un pour le gigot et l’autre pour les pommes de
terre.
C’était la coutume, dans notre quartier, de faire
cuire, le dimanche matin chez notre pâtissier du
quartier, le repas dominical.
Il n’y avait qu’une seule porte à franchir pour aller
dans son laboratoire, on était voisins.
En échange de la cuisson gratuite, papa achetait un
gros gâteau.
Souvent on mangeait ensemble avec mes Grands-
Parents.
Et maman avait toujours son morceau préféré : « la
queue ».
Mon grand-père m’envoyait chez son pâtissier à
lui « Le meilleur »
Pour aller acheter des énormes choux à la crème
chantilly.
Des fois qu’il n’y en ait eu pas assez pour toute
cette marmaille.
Grand-père nous parlait souvent de sa guerre, moi
je trouvais ça triste.
Mais il avait une façon de raconter les choses avec
des détails qui faisaient toute la différence.
Et cela devenait plaisant, et ses anecdotes nous
tenaient en haleine.
Il montrait son poing gauche, et nous, tous
ensemble on criait bien fort :
« Ça c’est l’hôpital » et le poing droit : « ça c’est la
mort. »
On le savait par cœur.
A la fin du repas, pour le dessert, Papa disait
toujours,
« Ça a un goût de revenez-y »
Greg, JP, Francis, et Filou le répétaient en cœur
Pour en avoir encore plus, c’était notre rituel.
Parfois Lucienne était là le dimanche, et c’était la
fête.
J’aimais bien ces repas en famille quand mes
parents étaient en période d’accalmie,
La vie était belle encore pour un moment,
En attendant la prochaine tempête qui pointait son
nez à l’horizon.