L’Opinel
1957
Caro Diario
Caro Diario
Dans la maison de mon enfance Place de la halle
Il se passait toujours des choses, des bonnes
comme des mauvaises.
Mon grand-père qui était un homme exceptionnel,
M’a fait la première grande peur
De ma vie
Et il ne le voulait pas.
Ce jour-là, dans notre appartement au troisième
étage,
Maman et moi, seules pour la journée, vîmes
arriver mon grand-père rouge et ivre de colère.
Il criait contre maman et lui faisait des reproches
sur sa conduite.
Puis d’un geste qui m’a semblé rapide, sortit de sa
poche son OPINEL qui ne le quittait jamais,
L’ouvrit et le brandit en direction de maman.
Sa main bougeait dans tous les sens et il la
menaçait.
Il criait, hurlant de plus en plus fort, qu’il allait
Lui faire une boutonnière. Moi je ne savais même pas ce que cela voulait
dire, sauf que cela me semblait terrible.
Du haut de mes six ans je interposai entre elle et
mon grand-père.
La boule au ventre je criais, je hurlais : « Ne tue
pas ma maman Pépé ».
Grand-père, surpris de ma réaction, rangea son
couteau dans sa poche et me prit par la main.
Et nous descendîmes à l’étage en dessous où ma
grand-mère nous attendait
Avec pour moi une grosse crêpe à la confiture,
Et pour mon grand père cette seule parole :
« Ernest tu es un
Badagorge »
Ce jour-là, ce grand géant de plus de un mètre
quatre-vingt-dix et de plus de cent kilos
Avait craqué devant cette petite fille en pleurs et
terrifiée.
J’avais fait pleurer ses yeux bleus de honte,
Et son regard resta doux pour moi à jamais.
Depuis ce jour, je n’aime plus les Opinel.
Retrouvez cette nouvelle dans "Des Mots pour mes Maux et souvenirs
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire