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dimanche 12 juillet 2020

                                                 


L’Opinel 
1957

 Caro Diario 
                                                                            

    Dans la maison de mon enfance Place de la halle Il se passait toujours des choses, des bonnes comme des mauvaises. Mon grand-père qui était un homme exceptionnel, M’a fait la première grande peur De ma vie Et il ne le voulait pas. 

   Ce jour-là, dans notre appartement au troisième étage, Maman et moi, seules pour la journée, vîmes arriver mon grand-père rouge et ivre de colère. Il criait contre maman et lui faisait des reproches sur sa conduite. Puis d’un geste qui m’a semblé rapide, sortit de sa poche son OPINEL qui ne le quittait jamais, L’ouvrit et le brandit en direction de maman. 

   Sa main bougeait dans tous les sens et il la menaçait. Il criait, hurlant de plus en plus fort, qu’il allait Lui faire une boutonnière. Moi je ne savais même pas ce que cela voulait dire, sauf que cela me semblait terrible. Du haut de mes six ans je interposai entre elle et mon grand-père.

    La boule au ventre je criais, je hurlais : « Ne tue pas ma maman Pépé ». Grand-père, surpris de ma réaction, rangea son couteau dans sa poche et me prit par la main. Et nous descendîmes à l’étage en dessous où ma grand-mère nous attendait Avec pour moi une grosse crêpe à la confiture, Et pour mon grand père cette seule parole : « Ernest tu es un Badagorge »

    Ce jour-là, ce grand géant de plus de un mètre quatre-vingt-dix et de plus de cent kilos Avait craqué devant cette petite fille en pleurs et terrifiée. J’avais fait pleurer ses yeux bleus de honte, Et son regard resta doux pour moi à jamais. 

       Depuis ce jour, je n’aime plus les Opinel.



                      Retrouvez cette nouvelle dans "Des Mots pour mes Maux et souvenirs




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